jeudi 11 octobre 2012

01 | PhileoL Madagascar | Solution d'entreprise à la pauvreté

Tana, Hôtel La Ribaudière, le 11/10/2012
Rencontre de Nary RAZAKASOLO, « associé polyvalent » et DAF de PhileoL Madagascar
PRODUCTION ET EXPORTATION D’HUILES BRUTES VEGETALES


Cliché PhileoL Madagascar

L'idée

PhileoL Madagascar SARL (Capital social : MGA 938 925 0001) est une entreprise sociale et responsable de droit malgache, qui développe la filière oléagineuse inclusive dans le sud de Madagascar

Elle a pour objet la production d’huiles brutes végétales destinées à l’exportation. L’usine de production se trouve à Tsihombe, dans l'extrême sud de Madagascar, région dont le climat est particulièrement adapté à la production d'oléagineux. Les matières premières (principalement le ricin) proviennent des districts environnants, dans une zone très aride, très pauvre et difficile d'accès de 200 km sur 30 km. Le siège social est à Tana

Historique

Fruit de la rencontre :
- d'un ingénieur chimiste français (Stéphane PHILIZOT) avec
- deux ingénieurs agronomes malgaches (Njaka RAVELOMANANTSOA et Nary RAZAKASOLO),
cette entreprise métisse naît le 30 juin 2008, quelques mois avant le début de la crise

Dans une région socioculturellement difficile, elle a d'abord investi dans les relations humaines et dans la mise en confiance des différentes parties prenantes de la filière, se distinguant ainsi de ses concurrents. En établissant un système d'approvisionnement direct auprès des paysans, la filière rétribue en outre rentablement et équitablement les producteurs. La création de la filière stabilisera les prix par le mécanisme de l’offre et de la demande
PhileoL Madagascar améliore aujourd'hui les revenus de 6000 familles paysannes (500 en 2009), 9 salariés en CDI la composent (dont les 3 fondateurs) et 45 animateurs en CDD structurent le réseau local de producteurs. 80 emplois créés en tout

Les associés sont également attachés au respect de l'environnement pour un développement durable de l'entreprise. Ils favorisent notamment les variétés endémiques. Le ricin participe en outre en particulier à la stabilisation des sols
Cultivé à Madagascar dans les années 50, 60 et 702, le ricin avait été abandonné depuis. Quelle ne fut pas la surprise de bon nombre de paysans dès la première année d'existence de l'entreprise, de pouvoir tirer bénéfice de ce qui poussait à l'état sauvage dans leurs champs !
Les associés encouragent également les paysans à diversifier leurs activités, la production intensive serait dangereuse pour eux en cas de variation brutale des prix du ricin. Il ne s'agit pas non plus que les paysans fassent l'impasse sur la production de leur nourriture. Un autre avantage du ricin : celui-ci leur apporte des revenus pendant la « période de soudure » de leurs activités vivrières

Aujourd'hui, PhileoL valorise de nombreuses parties de la plante (Comme dans le cochon, tout est bon !) :
- Huile brute de ricin : commercialisation vers l'Industrie (plasturgie, cosmétique...)
- Boues de traitement de l'huile de ricin : commercialisation vers les savonneries
- Tourteaux de ricin : amendement organique et anti-nématodes
- Feuilles : fertilisation des sols par apport d'humus et de sels minéraux puisés par le pivot du pied de ricin
- Branches et pédoncules : utilisation en biomasse
- Coques de ricin : utilisation en carburant de chaudière

Plusieurs projets d'amélioration sont engagés. L'amélioration des semences est une des priorités, celles-ci ayant tendance à dégénérer. Il faut également tenir compte des particularités locales des populations. Les observations d'un doctorant en anthropologie permettront prochainement de connaître les réelles motivations des paysans et d'ainsi arriver à les convaincre de l'intérêt pour eux de participer au projet. Le regroupement en coopératives est encore trop loin de leurs préoccupations et l'idée devra venir d'eux pour que cela fonctionne

En 2009, les associés ouvrent le capital de l'entreprise à I&P pour le développement (société de capital risque qui appuie les initiatives privées en Afrique). En février dernier, 2 entreprises rejoignent également les associés : la Fondation Grameen Crédit Agricole Microfinance Foundation (pour l'aspect « Social Business ») et SofiSud SAS, spécialiste des développements dans l’hémisphère Sud, filiale du groupe Sofiproteol (pour la performance des activités agricoles et industrielles)

D'autres partenariats sont en cours : Solidarité Internationale pour le Développement et l’Investissement (SIDI), Comité Catholique contre la Faim et pour le Développement (CCFD), Banque Européenne d’Investissement (BEI), ONG Secours Islamique de France (SIF), ONG EFA et ONG InTERREsolidaire de France, PNUD, PIC (Pôle Intégré de Croissance)...

… et d'autres en préparation : GRET, FERT, WWF, PSDR (Projet de Soutien au Développement Rural), Solar fire...

Résultats

L'unique concurrent est l'Inde, très loin devant : 600.000 tonnes d'huile, contre 264 tonnes pour PhileoL Madagascar en 2011 (10 fois plus qu'en en 2008)
Malgré la crise, l'équilibre sera atteint fin 2012. Un problème de trésorerie subsiste encore

Objectif 2014 : 1000 tonnes d'huile dans le sud
Le seuil de rentabilité sera atteint à partir de 2014. Le Résultat Brut d’Exploitation dépassera alors 25% du chiffre d’affaires

Objectif à terme en vitesse de croisière : 3000 tonnes d’huiles toutes espèces confondues sur tout Madagascar

Perspectives de développement

La marge de progression face à l'Inde et donc le potentiel sont énormes
La France est un des marchés de l'entreprise, mais elle impose de nombreuses contraintes réglementaires (en particulier concernant les métaux lourds) qu'elle ne peut aujourd'hui imposer à l'unique exportateur qu'est l'Inde. Elle a tout intérêt à faire jouer la concurrence, tout comme les autres pays européens et la très proche Afrique du Sud

La prochaine étape consiste à améliorer le process d'extraction de l'huile
Les associés étudient également la faisabilité d'étendre leurs activités à d'autres plantes endémiques d'autres provinces de Madagascar. Ils n'envisagent pas à ma connaissance le développement du modèle existant dans d'autres pays

Acquérir un véhicule pour les déplacements des associés pourrait être envisagé prochainement. Les 3 premières années, ceux-ci s'effectuaient en taxi-brousse, alors que les pistes sont en très mauvais état. Un concessionnaire automobile pourrait peut-être être intéressé par un partenariat ?
La « transition » semblant se pérenniser, les Malgaches parient aujourd'hui plus sur l'intervention d'autres pays, notamment de l'Union européenne, pour aider un jour à remettre en état le réseau routier. De toute façon, d'après Nary RAZAKASOLO, les paysans du sud ne seraient pas encore prêts pour un développement économique rapide de leur région. Un mal pour un bien ?


Un grand merci pour cet entretien passionnant et bonne continuation ! Je suivrai le développement de PhileoL Madagascar avec le plus grand intérêt

11 EURO = 2840 MGA (ariarys) au moment où j'écris ces lignes
27 000 tonnes de ricin en 1965



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